À coups de points

par | Mai 5, 2021 | Féminisme, Langue | 0 commentaires

Les propositions de loi pleuvent, Jean-Michel Blanquer s’en mêle. On s’insurge en commentaires. Horreur, la langue française, si bel héritage de notre grandeur est en péril, triturée et abîmée, protégeons-la de cette nouvelle mode, véritable lubie des féministes.
Et dire que c’est à nous qu’on reproche d’en faire tout un foin.

Ces gens-là, j’aimerais bien les bombarder de points médians, juste pour la blague. Parce qu’entre rire et hurler, j’hésite un peu. En s’enlise dans un tas d’inepties. Combien de fois faudra-t-il répéter que l’écriture inclusive ne se réduit pas au point médian ? Attention, scoop : on peut écrire de manière parfaitement claire et inclusive sans utiliser le moindre point médian. Incroyable, non ?

Donc, si votre problème, c’est le point médian (après tout pourquoi pas), merci de préciser un peu plus vos interdictions. Renseignez-vous. Faites donc preuve de la clarté qui semble vous être si chère. Interdisez le point médian si ça vous chante, mais pas le principe même d’écriture inclusive. Quant à nos enfants, je ne pense pas qu’il y ait quoi que ce soit de perturbant dans le fait de leur apprendre à s’exprimer dans une langue égalitaire. En revanche, il est grand temps d’arrêter de leur enseigner que le masculin l’emporte sur le féminin, car, ça, c’est lourd de sens et indigeste.

Je terminerais par une superbe citation découverte grâce à Mathilde Larrère et son livre Rage against the machisme :

« L’omission du féminin dans le dictionnaire contribue plus qu’on ne le croit à l’omission du féminin dans le droit. L’émancipation par le langage ne doit pas être dédaignée. […] La féminisation de la langue est urgente, puisque pour exprimer la qualité que quelques droits conquis donnent à la femme, il n’y a pas de mots. […] Quand on aura révisé le dictionnaire et féminisé la langue, chacun de ses mots sera, pour l’égoïsme mâle, un expressif rappel à l’ordre. »

Hubertine Auclert, « L’Académie et la langue », Le Radical, 18 avril 1898.

 

1898, et après on ose nous parler de mode.